L’ESPRIT LIBÉRAL DU CORAN: le statut de la femme

  • 18 novembre 2020
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femmes tunisiennes en 1912
18 Nov

Les peuples conquis par la nouvelle religion, les nations soumises à l’Islam et à l’influence des premiers Khalifes ne renonçaient pas, en embrassant la religion Musulmane, à leurs us et coutumes, et même à certaines superstitions et croyances de leurs anciennes religions, superstitions et croyances, qui se sont infiltrées dans la religion Juive et Chrétienne.

Il est établi que certaines coutumes phéniciennes et assyriennes ont été reproduites par les Israélites. Certaines éphémérides chrétiennes ne sont que la reproduction à peine déguisée des éphémérides païennes. Le Carnaval est-il autre chose que les Bacchanales ? Les jours de la semaine ne sont-ils pas consacrés à Mars, Mercure, Jupiter, Vénus et Saturne ?

Parmi les peuples soumis à l’Islam, celui dont l’influence a été funeste — elle l’est malheureusement jusqu’à ce jour — c’est le peuple Perse ou Persan.

La Bible et les auteurs Grecs et Latins nous ont fait connaitre d’une façon très claire et très précise la vie, les mœurs et les croyances de ce peuple. Nous savons combien les sciences occultes, divinatoires et magiques étaient et sont toujours en honneur chez les Persans. Ils étaient efféminés, leurs mœurs étaient polies et obséquieuses, leur abord courtois et agréable, et forcément, lorsque les conquérants eurent fait place aux administrateurs, la rudesse de leurs mœurs s’adoucit et l’influence des peuples conquis se fit sentir sur eux.

Cette influence fut telle que les femmes musulmanes, qui circulaient partout le visage découvert jusqu’à la fin du siècle de l’hégire, crurent de bon ton de se voiler la figure, comme les femmes Persanes en présence de toutes personnes étrangères à la famille. Nous sommes déjà bien loin de l’anecdote suivante rapportée dans les Hadiths :

« Un jour, Asma, fille d’Aboubeker et sœur d’Aïcha, épouse du Prophète, pénétra auprès de celui-ci vêtue d’une tunique d’étoffe transparente, sous laquelle sa nudité était à peine voilée. Le Prophète lui reprochant cette tenue « O Asma ! lui dit-il, quand la femme a atteint sa nubilité, elle ne doit laisser voir de sa personne que ceci et cela (et il montra la paume de ses mains et sa figure) ».

Ce propos nous a été rapporté dans les Hadiths par Aïcha, l’épouse du Prophète, Aïcha dont la science de la Religion était si grande que le Prophète, en parlant d’elle, disait : « O croyants, apprenez la moitié de votre religion de cette femme à la figure rousse (de cette femme rouge[1]). »

Ce propos des Hadiths prouve à l’évidence, avec d’autres textes que nous allons citer, que c’est à tort que la femme musulmane se voile la figure, est recluse dans sa maison et se trouve absolument retirée de la vie et de la civilisation.

Bien que cette démonstration ne fasse point partie intégrante du sujet que nous nous proposons de traiter, l’émancipation de la femme musulmane sera d’une telle importance pour la civilisation musulmane, que nous ne pouvons résister au désir de prouver combien l’interprétation contraire est erronée et de démontrer que la femme ne peut subir d’autre « diminutio capitis » que celle de voir sa part d’héritage réduite à la moitié de celle d’un enfant mâle.

Il résulte de l’anecdote que nous venons de mettre sous les yeux du lecteur que, d’après le Prophète lui-même, la femme musulmane ne doit pas être voilée. En effet, le Prophète voyait face à face sa belle-sœur Asma durant l’existence de sa femme Aïcha. Une belle-sœur, aux termes de la loi musulmane, est une étrangère, puisque, après la mort de la femme, elle peut épouser le mari de sa sœur.

« N’épousez pas non plus……. deux sueurs en même temps. »
Coran, chapitre IV, verset 27.

Ce verset interdit d’épouser deux sueurs en même temps, mais il est recommandé non seulement chez les Musulmans, mais chez les Juifs également par raison de convenance personnelle ou de famille, d’épouser la sœur d’une épouse défunte. Dans ces conditions une belle-sœur est toujours une épouse éventuelle et elle doit toujours être voilée devant son beau-frère.

Il nous faut maintenant examiner si d’après le Coran et les Hadiths, d’après la religion musulmane, en un mot, ce voile doit ou non être supprimé.

femmes européennes en Tunisie 1912
Deux femmes européennes en Tunisie 1912

La suppression de ce voile, c’est l’émancipation de la femme, c’est la guerre au fanatisme et à l’ignorance, c’est la diffusion des idées de progrès et de civilisation, c’est la sauvegarde des intérêts supérieurs de la famille et du patrimoine familial, c’est enfin la reconstitution de la société musulmane comme elle l’était aux temps du Prophète et de ses compagnons, c’est-à-dire comme la société européenne.

Tous les jurisconsultes, tous les savants, tous les commentateurs, qui ont traité cette question et imposé cette prohibition à la femme musulmane de montrer son visage, s’appuient sur les versets suivants : « Dis aux croyants de ne pas exprimer le désir de la femme par leur regard et d’éviter toutes relations charnelles illicites. Ainsi ils en seront plus purs : Dieu voit et contrôle tout ce qu’ils font.

Dis aux croyantes de ne pas exprimer par leur regard le désir de l’homme et de ne se donner qu’à ceux qui ont le droit de les posséder, d’avoir une tenue décente et honnête, de couvrir leur gorge d’un voile, de ne laisser voir[2] tout ce qu’elles auront fait pour s’embellir qu’à leurs maris, à leurs frères, aux pères de leurs maris, à leurs fils ou aux fils de leurs maris, à leurs frères ou aux fils de leurs frères, aux fils de leurs sœurs ou aux femmes de ceux-ci, ou à leurs esclaves, ou aux domestiques miles de mœurs vertueuses (sur lesquels il n’y a pas de soupçon) ou aux petits garçons qui ne jettent pas encore sur les femmes un regard de convoitise ou de plaisir. Que les femmes évitent de faire entrevoir leurs charmes par leur démarche. Cela rend vos cœurs plus purs et plus vertueux ! » Coran, chapitre XXIV, versets 30 et 31.

Cette traduction a malheureusement besoin d’une explication. M. Kasimirski[3] a expliqué le mot zina par « ornement ». Or, le mot zina signifie, en arabe, tout ce qui sert à parer et à embellir. C’est donc autant la tenue que le vêtement, que la coiffure, que la propreté, que les menus soins de la toilette, que les bijoux, que les parfums, enfin autant les éléments d’une tenue décente que ceux de la coquetterie la plus raffinée.

Comment les jurisconsultes, les savants et les commentateurs musulmans ont-ils traduit le mot zina ? Ils ont dit que zina signifie « visage ».  Ainsi, par cette traduction, ou plutôt cette interprétation, le résultat a été facilement atteint et il a été interdit à la femme de se découvrir le visage devant toute autre personne que celles énumérées dans les versets ci-dessus.

Cette traduction ou cette interprétation serait inspirée par la plus crasse ignorance si le but que les commentateurs et consorts voulaient atteindre n’était pas évident, s’il n’était pas clair qu’ils ont voulu imposer une prohibition là où elle n’existe pas et où elle n’a jamais existé.

En dehors de versets, que nous venons d’indiquer, rien dans le Coran ne traite de ce prétendu voile, que les femmes Musulmanes doivent mettre sur leurs figures.

Par la simple lecture de ces versets, il est démontré qu’il n’y a aucune prohibition pour la femme Musulmane à faire voir son visage et que moyennant certaines conditions de décence et de bonne tenue, les femmes peuvent exposer leurs traits à tous les regards.

Nous allons maintenant examiner les textes, qui ont servi aux commentateurs pour cloîtrer la femme Musulmane dans sa maison et en faire une véritable recluse.

Ces textes concernent deux catégories de femme : Les femmes du Prophète et la généralité des femmes Musulmanes.

Pour les premières, il y a les versets suivants : « O croyants, n’entrez point sans permission dans les maisons du Prophète….

Si vous avez besoin de leur demander quelque chose, adressez-leur la parole à travers un obstacle, qui les soustrait à votre regard, vos cœurs et les leurs en seront plus purs et plus vertueux. Evitez de nuire à l’envoyé de Dieu. N’épousez jamais les femmes qu’il a pu posséder : ce serait grave aux yeux de Dieu ». Coran, chapitre XXXIII, verset 53.

« Mais cet obstacle (qui soustrait les femmes du Prophète aux regards de leurs interlocuteurs) doit disparaître devant leurs pères, leurs enfants, leurs neveux et leurs femmes et devant leurs esclaves ». Coran, chapitre XXXIII, verset 55.

« O femmes du Prophète ! vous n’êtes point comme les autres femmes, si vous êtes vertueuses. Ne tâchez pas de plaire par vos paroles, de peur que l’homme, dont le cœur est malade de désir, ne vienne à jeter sur vous des vues coupables. Tenez toujours un langage décent.

Restez dans vos maisons, ne montrez pas vos charmes comme les femmes des temps passés de l’ignorance et de l’idolâtrie ». Coran, chapitre XXXIII, versets 32 et 33.

Faut-il un commentaire pour ces versets ? Leur sens n’est-il pas d’une clarté aveuglante ?

Le Coran — il est essentiel de l’observer, même au risque de nous répéter, le sujet en vaut la peine — le Coran n’impose pas aux femmes du Prophète de se voiler la figure, il leur prescrit de se soustraire aux regards, et il recommande aux croyants de leur parler à travers un obstacle, qui les cache aux regards de leurs interlocuteurs, par exemple à travers une cloison, une porte, un rideau, etc…

Le Coran désire que les femmes du Prophète ne se laissent pas aller aux vivacités d’une conversation spirituelle et enjouée, ne cherchent pas à se rendre désirables, il voudrait qu’elles eussent un langage décent et une tenue discrète, austère, disons le mot. Il leur recommande de ne pas trop se montrer dans les rues, de ne pas se livrer à ce luxe effréné des païens, dont le résultat était d’exposer les charmes de la femme aux regards des hommes.

Ces recommandations adressées aux femmes du Prophète peuvent-elles concerner toutes les autres femmes ? — Évidemment non. Le Coran l’indique lui-même. Les femmes du Prophète ne sont pas comme la généralité des femmes Musulmanes, elles leur sont supérieures, parce que femmes du Prophète. En veut-on une preuve ? Toutes les veuves Musulmanes peuvent se remarier. Ce second mariage est interdit aux femmes du Prophète.

Par conséquent, toutes les recommandations contenues dans les versets ci-dessus, constituent une exception à la règle générale, exception, qui, pour employer une expression banale, ne peut que confirmer cette règle générale.

D’ailleurs — nous ne saurions assez insister sur ce point — ces versets sont adressés aux femmes du Prophète exclusivement, sans cela, ils seraient conçus de la façon suivante : « Dis aux femmes Musulmanes ou aux femmes des croyants, etc. »

Il existe une autre explication de ces versets, qui confirme entièrement cette interprétation et ce commentaire. Elle consiste dans les circonstances ou les causes de la révélation de ces versets au Prophète[4].

« Abdallah Ibnou Abbas, le Cousin du Prophète, raconte, dans les Hadiths, qu’un jour un homme était venu voir le Prophète et avait prolongé plus que de raison son entrevue avec lui. Le Prophète s’était excusé par trois fois et il était sorti de la pièce, dans laquelle ils se trouvaient ensemble, sans que l’importun eût compris le sens de ces excuses et de ces sorties par trois fois réitérées. Le Prophète était fort ennuyé et ne savait comment se débarrasser de ce visiteur malencontreux.

Survint Omar Ibnou El Khattab, le deuxième Khalife. Omar, voyant tout ce que la figure du Prophète exprimait d’impatience, demanda au visiteur : « Peut-être que tu as ennuyé le Prophète » ? Le Prophète répondit : « Je suis sorti par trois fois, je me suis excusé par trois fois et il n’a pas compris que son audience était terminée ».

A la suite de cette explication plutôt fraiche, le visiteur importun et malencontreux comprit et s’en alla. Alors Omar dit au Prophète : « Tu devrais enfermer tes femmes dans ta maison et les soustraire aux regards des importuns, car tes femmes, les femmes du Prophète, sont supérieures aux autres femmes. Ainsi tu ne seras plus ennuyé chez toi par de tels visiteurs ».

Voilà les circonstances dans lesquelles les versets, que nous venons de recopier, ont été révélés. On voit, par ces causes de révélation, que ces versets ne peuvent s’appliquer qu’aux seules femmes du Prophète et que l’interprétation contraire, l’interprétation, qui généralise leur application à toutes les femmes de tous les Musulmans, constitue un véritable non-sens et une véritable hérésie.

En ce qui concerne la généralité des femmes Musulmanes, il n’y a dans le Coran aucun verset, qui leur ait imposé de sortir voilées ou de se cloîtrer chez elles.

Il n’y a, au sujet de l’attitude des femmes avec les hommes, qu’un propos du Prophète rapporté dans les Hadiths, et encore ce propos est-il, comme toujours, bien faussement interprété et commenté :

Le Prophète a dit : « Une femme ne peut rester en tête à tête qu’avec un homme, qu’il lui est interdit d’épouser (par exemple son père, son frère, son oncle, son grand-père, etc.…) ».

Le sens de ce Hadith est bien clair et conforme aux règles de bienséance. Ce sont les règles adoptées non seulement par les Juifs et les Chrétiens, mais encore par les adeptes des autres religions et même par ceux qui n’ont pas de religion.

Les jurisconsultes, les savants et les commentateurs ont généralisé à tel point le sens de ce Hadith qu’ils ont interdit à la femme musulmane, non seulement de ne pas montrer sa figure à toute autre personne que celle qu’il lui est interdit d’épouser, mais encore de se tenir enfermée, cloîtrée, recluse pour toute autre personne. Elle ne pourra même pas, d’après ces commentateurs, se trouver en présence de deux hommes, dont l’un est son proche parent et qu’elle ne pourra pas épouser, et l’autre un étranger, c’est-à-dire un mari possible.

Peut-on dénaturer, torturer davantage un texte d’une clarté pourtant si évidente et précise ? Ne doit-on pas, en lisant ces interprétations, dire que la bonne foi n’a pas présidé à ces commentaires ?

Il découle de tout ce que nous venons de dire que la femme musulmane doit avoir le visage découvert, que rien ne l’oblige à vivre enfermée chez elle et à se soustraire aux regards, qu’elle peut, comme la femme européenne, rentrer, sortir, vaquer à ses occupations sans aucun danger pour la Société Musulmane.

L’instruction est obligatoire pour la femme musulmane. Trois propos des Hadiths nous le démontrent :

  • Le Prophète avait instruit sa femme Aïcha et recommandait aux croyants d’aller puiser leur instruction religieuse auprès de cette femme au visage rousse.
  • Le Prophète disait : « L’instruction est obligatoire pour tout Musulman et toute Musulmane. »
  • Cette instruction était si chère au Prophète, tellement recherchée et prisée par lui, tellement nécessaire, d’après lui, pour cette nouvelle religion, qui devait réunir l’humanité entière en une seule société, qu’il recommandait aux croyants de ne jamais manquer une occasion d’apprendre, de puiser à toutes les sources d’instruction, de la rechercher partout, d’où qu’elle vint : « Puisez la science, disait-il dans les Hadiths, partout où elle peut se trouver, même en Chine. »

Les conclusions à tirer de tout ce qui précède sont les suivantes : les femmes doivent avoir le visage découvert, ne doivent pas être enfermées chez elle, ne doivent pas être soustraites aux regards, doivent être instruites et avoir une attitude décente et honnête.

Ces principes ne sont pas extraordinaires, ils découlent de la morale et devaient avoir forcément leur place dans le Coran et dans la Religion Musulmane.

Nous dirons plus ; ces principes devaient être proclamés par le Prophète, car, avant lui, avant l’Islam, les femmes des Arabes n’étaient pas d’une vertu à toute épreuve et leurs relations adultérines étaient la cause de troubles, de massacres, de vengeances et de guerres même. A ceux qui recherchaient les causes de tous ces désordres on répondait par le fameux principe : « cherchez la femme ».

Les enlèvements de femmes sont encore chez les Arabes des causes de crimes et de vengeances atroces, qui ont souvent leurs épilogues devant les Tribunaux. Aussi le Coran punit-il l’adultère des peines les plus sévères : la lapidation pour les coupables.

Un élément, qui prouve encore notre théorie, c’est que toutes les femmes des campagnards, celles qu’on appelle les Bédouines, ont toutes le visage découvert. Ce n’est que dans les grandes villes que le voile a été imposé. Pourtant, il faut le reconnaître, à Constantinople, c’est-à-dire dans la résidence même du Khalife, du Commandeur des Croyants, les femmes ont le visage découvert. En Syrie et en Égypte, pays qui sont les patries de l’Islam, les femmes ont le visage couvert à moitié par un voile tellement léger, tellement transparent, qu’il peut être considéré comme l’équivalent de la voilette de la femme européenne.

Alors pourquoi, dans les pays occidentaux de l’Islam, la femme musulmane a-t-elle le visage couvert d’un voile si épais ? Pourquoi est-elle vêtue d’un haïk ou d’une couverture, qui la fait plutôt ressembler à un paquet d’étoffes qu’à une forme humaine ? Pourquoi ? Les jurisconsultes, les savants et autres commentateurs en ont donné l’explication suivante : « Les femmes doivent avoir le visage couvert parce que, dans le cas contraire, elles seraient l’objet des désirs et des rivalités des hommes ». Cette explication est bien puérile, et si on appliquait ce principe dans toute sa rigueur, si on voulait être logique, pour les mêmes raisons, les hommes devraient aussi avoir le visage couvert. Les Touaregs, dont l’état d’avancement de la civilisation est connu, tirent de ces principes les conséquences rationnelles : les hommes et les femmes ont le visage couvert.

Si nous avons donné tout ce développement à ce point de notre travail, c’est que les conséquences de la prohibition pour les femmes d’exposer leurs figures ou leurs personnes aux regards ont eu sur la Société Musulmane les effets les plus funestes, les plus fâcheux et les plus désastreux.

Les poètes et les littérateurs, qui n’avaient plus sous leurs yeux de gracieux visages féminins, devaient forcément, dans leurs écrits ou leurs poèmes, dépeindre les charmes d’un jeune éphèbe, sous peine de tomber dans l’inceste et de chanter les beautés de leurs mères ou de leurs sœurs. Les poésies, qui se répandaient immédiatement dans le peuple et qui étaient récitées par tout le monde, formèrent ainsi dans la société Musulmane une mentalité spéciale, un état d’âme, attirant l’attention des Musulmans sur la beauté des jeunes gens et les incitant à pratiquer ce vice contre nature, ce vice infâme, si en honneur chez les Grecs anciens et les Persans.

Pourtant telles n’étaient pas les mœurs des premiers croyants, et les poèmes, que nous avons conservés des contemporains du Prophète, qui avaient reçu leur instruction du Prophète lui-même ou de ses compagnons, vantent en un style merveilleux, dans des vers admirables, l’adorable beauté de la femme.

Cette prohibition, qui a eu pour résultat de renfermer, de cloîtrer, de reléguer la femme dans un gynécée, permet au mari de se livrer, sans le contrôle de sa femme, sans le reproche, que la mère de famille peut et doit adresser au chef coupable de la famille, à des orgies, à des débauches infâmes et à dissiper ainsi le patrimoine de la famille et le bien de ses enfants.

Si nous voulions citer des exemples, si nous pouvions faire allusion à des personnalités tunisiennes, dont les descendants, victimes de l’incontinence et de l’imprévoyance de leurs auteurs, ont droit à toutes les sympathies et à tous les regrets, nous remplirions bien des pages de cet ouvrage. Et cependant tout cela ne serait pas arrivé si l’épouse, si la mère, si la sœur, si la fille avait eu le droit de rentrer dans le sanctuaire réservé au chef de la famille et à ses compagnons de débauche, et si elle avait pu lui dire : « Monseigneur, vous, vos amis, vos invités et ces prostitués et ces musiciens, qui sont ici, vous nous empêchez de dormir avec nos enfants » !

Cette prohibition a eu un autre résultat, peut-être plus important encore la femme doit être voilée, la femme doit être reléguée dans le gynécée, elle ne peut par conséquent pas, quand elle recueille une succession, quand elle est tutrice d’enfants mineurs, quand elle a des biens personnels, les administrer par elle-même.

D’ailleurs, il faut être logique, cette femme, qui n’a jamais rien connu de la vie, peut-elle savoir administrer, peut-elle rien connaître du monde extérieur, peut-elle savoir la valeur ou l’importance de quoi que ce soit ? Dans ces conditions, par la force même des choses, elle est obligée de placer sa confiance en un mandataire, qui est toujours infidèle et qui s’approprie les fortunes confiées à son honnêteté. Que de ruines par suite de cette prohibition ! En compulsant les archives des Tribunaux indigènes, que de milliers et des milliers de jugements absolument inefficaces, absolument inexécutables, nous pourrions produire sous les yeux du lecteur ! Si l’instruction obligatoire, qui est imposée par le Prophète dans les Hadiths — et les Hadiths constituent une des sources de la religion Musulmane, — si l’instruction obligatoire était un fait acquis, la femme connaîtrait l’étendue de ses droits, la femme saurait qu’aucun texte ne lui impose de se voiler la figure, qu’aucun texte ne l’oblige à être enfermée dans une maison comme dans une prison, qu’elle a le devoir de surveiller ses intérêts et ceux de ses enfants, de songer à leur avenir, de contrôler leur instruction et leur éducation, qu’elle a droit à sa place au foyer, à l’existence, au soleil au même titre que l’homme et alors que de changements dans la société Musulmane!

2ère partie du livre: “L’ESPRIT LIBÉRAL DU CORAN”:

  • Écrit en 1904 par : ABDELAZIZ ETTÉALBI: LEADER POLITIQUE ET RELIGIEUX TUNISIEN
  • Traduit de l’arabe par: EL HADI SEBAÎ: EX SECRÉTAIRE AU GOUVERNEMENT TUNISIEN – EX INTERPRÈTE AU TRIBUNAL DE LA DRIBA
  • Publié à Paris en 1905 (Éditeur, Ernest LEROUX – 28, Rue Bonaparte) avec l’appui de: CÉSAR BEN ATTAR: AVOCAT DE ETTÉALBI, CORRESPONDANT DU MINISTÈRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE

[1] « Houmeyra », fille rousse, une épithète donnée à Aïcha par le Prophète.

[2] Mot à mot : de ne laisser voir de leurs ornements que ce qui est à l’extérieur.

[3] Adalbert Kazimirski (1808-1887) : est un orientaliste arabisant d’origine polonaise, auteur d’un dictionnaire bilingue arabe-français et de plusieurs traductions arabe-français, notamment du Coran.

[4] Chacun des versets du Coran a été, d’après la tradition coranique et la Religion Musulmane, révélé au Prophète dans des circonstances déterminées, qu’on appelle a les causes de la révélation ». Tous les auteurs se réfèrent à ces causes de la révélation du verset pour en saisir toute la portée et tout le sens. Tous les auteurs, ainsi que nous le démontrons plus bas, sont unanimes sur les causes des révélations des versets.

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